Faust

Auteur :Johann Wolfgang von GoetheGoethe

Éditeur : Bartillat, 3e édition
Édition établie par : Jean Lacoste et Jacques Le Rider

Collection : -

Parution : 2014

Pages :798 pages



Pour la première fois en langue française, cette édition se propose de réunir les trois grands textes de Goethe où s'enracine le mythe de Faust : l'Urfaust (1775), le Faust I (1808), le Faust II (1832). Accompagnée d'un important apparat critique, elle rend ces textes accessibles au lecteur d'aujourd'hui et lui ouvre des perspectives d'interprétation contemporaines. L'Urfaust, texte méconnu, constitue une préfiguration de la première partie de la tragédie à venir.

Mon avis

Ça fait quelque temps déjà que j’ai lu la troisième édition de la tragédie de Faust qui inclut Urfaust, Faust I et Faust II, et je voulais vous en parler pour la raison que tout le monde le connaît, ne serait-ce que de nom. Je l’ai lu en octobre dernier et je dois dire que la lecture était idéale pour une ambiance automnale. Disons-le, si vous avez les trois textes et ne voulez pas l’analyser, mais plutôt profiter de sa lecture, ne faite pas la même erreur que moi, soit lire Urfaust (Faust un fragment) avant tout le reste. Malgré ses 775 pages, le tout se lit plutôt vite et il ne m’a fallu seulement que quelques soirées pour en venir à bout. J’ai beaucoup aimé cette œuvre, l’ambiance sombre était pesante et j’adorerais assister à la pièce de théâtre (qui se fait encore d’ailleurs). Pouvoir comprendre l’allemand et avoir la chance de la vivre en version originale, en Allemagne, serait une expérience fabuleuse dont je rêve ! Avant cette édition, nous n’avions pas encore la chance d’avoir une version exhaustive en français, malgré ce monument littéraire, mais Jean Lacoste et Jacques Le Rider nous ont heureusement offert cette possibilité. Comme je vous le mentionnais, du seul point de vue du divertissement, Urfaust est un brouillon de ce qui allait devenir l’œuvre le plus important de la littérature allemande ! Il est en conséquence pratiquement à éviter, car il gâche un peu le plaisir de savourer ses suites achevées en nous révélant d’ailleurs la fin de Faust I. Si vous désirez découvrir mon résumé de cette œuvre phare de la littérature allemande, c’est par ici ! Si vous n’avez pas lu le livre et prévoyez le faire, sachez que je spoil considérablement.

            D’abord, la pièce a été écrite entre 1775 et 1832, soit 33 ans de travail acharné. Ce n’est pas peu dire ! Faust est un homme savant et acclamé par le peuple pour sa grande sagesse. Cependant, lui regrette cette qualité qu’il perçoit comme une nuisance héritée de son passé. Effectivement, il a passé toute sa jeunesse à essayer de comprendre le monde dans lequel il se développait et a malheureusement gâché ses plus belles années dans le processus. Constatent que son savoir était futile, et qu’il ne s’avait rien malgré tout l’effort déployé, il déprime jusqu’à conclure un pacte avec Méphistophélès, l’un des sept princes de l’enfer qui incarne parfois le diable sous terre dans certaines mythologies. Ce dernier se distingue du Diable par son refus et ses questionnements, car il est lui-même serviteur de l’enfer, prisonnier de ce lieu comme l’est l’homme mauvais. Il va même avertir le vieil homme des conséquences du pacte qu’il envisage. Faust ne l’écoute cependant pas, poussé par la fougue de la jeunesse. Une phrase de Méphistophélès m’a beaucoup plus; « Je suis l'esprit qui toujours nie ; et c'est avec justice : car tout ce qui existe mérite d'être détruit, il serait donc mieux que rien n'existât. ». Finalement, Méphisto est plus juste qu’on pourrait le croire!

            Faust I se compose de 4 615 vers, en comptant la dédicace et les deux prologues, que je n’ai pas très bien compris d’ailleurs. Je ne crois pas que ces deux derniers soient directement liés à l’action de l’histoire, je les ai donc passés et vous pouvez en faire autant sans que cela n’altère votre lecture. L’action se déroule du point de vue du docteur Faust, alchimiste, astrologue et magicien qui aurait véritablement vécu en Allemagne entre 1480 et 1540. Alors qu’il est tenté de se suicider, Méphisto lui apparaît et lui propose d’échanger son âme contre la jeunesse qu’il n’a pas vraiment eue. C’est alors que commence leur long voyage. Ensemble, ils vont rencontrer, à la sortie d’une taverne, la célèbre Marguerite qui revient de l’église. Faust en tombe rapidement amoureux, elle qui incarne l’innocence et l’assurance de la foi. Méphisto l’entraîne ensuite dans la chambre de Marguerite pour respirer l’air qu’elle a respiré et déposer un cadeau (des bijoux) dans son armoire afin de la séduire. Lorsque la jeune fille rentre dans sa chambre, elle découvre ces bijoux qu’elle porte à son coup et les déposes par la suite, sachant qu’ils ne lui appartiennent pas. Les deux tourtereaux se rencontrent par la suite dans un jardin où ils font plus amplement connaissance. La jeune femme tombe inévitablement sous le charme de Faust, au grand dam de sa famille. Faust en vient ainsi à lui donner un somnifère pour endormir sa mère, ce que Marguerite ne refuse étonnamment pas. Son frère provoque ultimement Faust dans un duel pendant lequel ce dernier va blesser le frère de Marguerite à mort, aidé par les pouvoirs de Méphisto. Ce dernier maudira sa sœur dans l’agonie!

            Tristement, leur amour ne fait pas long feu, alors que Marguerite, attendant un enfant, se voit délaissé par Faust. Elle est abandonnée par tout le monde, même les habitants du village qui la considère comme une fille perdue. Faust continue à suivre Méphistophélès dans ses voyages pendant ce temps. Un jour, celui-ci l’entraîne dans une fête néopaïenne célébrée dans la nuit du 30 avril au 1er mai, malgré les interdictions de l’Église qui l’identifie comme le sabbat des sorcières. Faust va y remarquer la pauvre Marguerite, méconnaissable avec ses yeux vides. Elle est condamnée au gibet avec d’autres prétendues sorcières, accusée d’avoir tué son enfant. Faust se révoltera alors contre Méphisto, qui s’adonne à une multitude d’orgies. La pièce se termine dans la l’infernale cellule de Marguerite alors qu’elle est dans son lit en proie à des cauchemars. Faust vient la délivrer, mais elle ne le reconnaît plus, et ce n’est qu’en évoquant leur amour passé qu’il saura se faire reconnaître. Malheureusement, cela n’y change rien et Marguerite se laisse sombrer dans la perdition, acceptant son crime et implorant Dieu de la sauver. Ainsi se termine tragiquement Faust I, que j’ai adoré.

            Faust II m’a moins interpellée et je crois l’avoir moins bien comprise, car elle est beaucoup plus complexe. Cette pièce est beaucoup moins tourmentée et moins tournée vers les problèmes d’angoisses que la précédente, mais plutôt axée sur les problèmes politiques et sociaux. Aussi, et c’est ce qui m’a plu, elle prend rapidement la forme d’une tragédie grecque. Pour bien l’apprécier et la comprendre, il faut avoir quelques notions de littérature classique. J’avais heureusement lu plusieurs auteurs classiques auteurs elle fait référence et c’est bien ce qui m’a permis de m’y retrouver. Effectivement, l’auteur s’inspire notamment de Dante (La Divine Comédie) et de Shakespeare (Le Songe d’une nuit d’été et La Tempête). Faust se réveille après un long sommeil commenté par Ariel, l’esprit aérien de Shakespeare. Il a vieilli et est devenu un vieillard qui a notamment oublié la pauvre Marguerite. Méphisto est encore à ses côtés, mais est cependant plus qu’un complice, c’est maintenant son double. Car dans la tragédie I, Faust s’opposait encore à Méphisto, mais dans la seconde, rien n’est moins sûr. À partir du deuxième acte, l’auteur nous plonge dans un monde politique corrompu qui rappelle l’époque de sa rédaction. Nous verrons que Faust est devenu ambitieux, avare et capitaliste. Dans Faust I, Faust était motivé par le pouvoir que lui procure la jeunesse qu’il n’avait jamais eue. Au pire, il revivait des choses qu’il aurait dû expérimenter, en profitant des pouvoirs du mal évidemment. Mais dans Faust II, il est désireux de bien plus. Il veut l’argent, le pouvoir, les terres, les femmes, etc. Et il est prêt à tout pour atteindre ses objectifs. Méphistophélès et Faust renflouent les coffrent de l’État et l’empereur ne se souci plus du budget et des affaires militaires. Non, ceux-ci sont désormais secondaires, et l’empereur se trouve aveuglé par des choses accessoires comme le défilé du carnaval. On devine ici presque une caricature de l’État du Saint-Empire germanique, bien que l’identité de l’empereur en question demeure inconnu du lecteur. Goethe n’indique aucune date, ni aucun lieu. De quel empereur s’agit-il et dans quel château? Je vous donne l’hypothèse la plus répandue : Charles IV qui a régné entre 1346 et 1378. Donc, Faust dois amuser la cour de l’empereur, et décide avec ses pouvoirs surnaturels de ramener les fantômes d’Hélène et Paris, tous deux issus de la mythologie grecque. Il tombe ensuite sous le charme d’Hélène et demande à Méphisto de l’emmener en Grèce antique, et c’est ce qu’il fait. Méphistophélès se déguise en gorgone, créatures fantastiques, et confis à Hélène que Ménélas projette de la tuer afin de la convaincre de le suivre jusqu’au château d’un seigneur désireux de la protéger, nul autre que Faust lui-même. Le nouveau va vire heureux quelque temps et aura un fils, Euphorion, qui décèdera tragiquement suite à une chute. Hélène quitte par la suite Faust, lui qui chante sa déception sur une grande montagne lorsque Méphisto le prévient que les féodaux préparent une grande bataille contre l’empereur. Bien sûr, le pouvoir du mal ne peut être vaincu et l’empereur finit par offrir une grande terre à Faust. La volonté de Faust, grand aménageur du territoire, se heurte à Philémon et Baucis, qui ont depuis toujours leur domicile au coeur de ses nouvelles terres. Faust incarne maintenant le grand propriétaire capitaliste qui cherche à expulser les derniers paysans, mais les deux prolétaires se montrent prêts à mourir pour défendre leurs maigres biens. Faust, vieillard et affaibli, voit apparaître 4 femmes grises aux noms lourds de sens, Allégorie du manque, Allégorie de la faute, Allégorie du souci et Allégorie de la détresse. En leur compagnie il accepte la mort, mais au lieu de sombrer dans l’enfer et conclure le pacte avec le Diable, l’âme de Faust est sauvée par la force des prières de Marguerite.

            Poétique, non? Oui, mais pathétique aussi! Voilà ce qui conclut l’énorme compte rendu de Faust. J’espère que vous avez aimé!

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